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1914-1918, difficile année 1918
En cette fin d’hiver 1918, la morosité est grande et le sentiment d’avoir perdu la guerre gagne la population française. La Russie se retire et libère le front oriental, les Parisiens, en grand nombre, fuient la capitale. Dans nos villages, on pleure les morts, nombreux, en redoutant plus qu’espérant la venue du facteur ou d’un représentant de l’autorité. Ce sont les femmes qui, depuis le début du conflit, asssurent les travaux quotidiens, aux champs, mais aussi dans les usines, les ateliers, les commerces. En trois ans et demi, la société française s’est adaptée au conflit, retissant des liens sociaux et économiques ; le retour dans les foyers n’en sera parfois que plus difficile.
Rodilhan n’échappe pas à ce climat pessimiste. Si, comme nous l’avons vu dans les épisodes précédents, les enfants Maurin sont encore engagés dans cette guerre, on sait que les soldats Alfred Joseph Bressac, Claude Etienne Palatan, Etienne Guillaume Pascal, Albert Léopold Pioch, dont le père est le cousin de Jean Édouard Pioch, sont décédés tous les cinq au combat. Ce sont ces hommes qui figurent, avec les deux frères Maurin, sur le monument aux morts de notre commune.
La famille Allier est également frappée par le décès d’Auguste, le 2 mai 1917, enfant de Rodilhan, mais demeurant alors à Saint-Gilles où il s’est marié, est porté sur le monument de cette commune.
De la même manière, Auguste LAVAL, un enfant du pays, né à Rodilhan en 1879 et mort au champ d’honneur le 26 septembre 1914, est mentionné sur le monument aux morts de Nîmes où il s’était marié, en 1912, et demeurait, chauffeur d’automobiles.
La vie dans le village s’écoule ainsi, triste, dans l’optique de lendemains qui ne chantent guère, de fêtes trop rares et d’événements du quotidien uniquement rythmés par la lecture des nouvelles du front et une volonté de maintenir une activité pérenne dans le village. Il est bien loin déjà ce temps où tous ces jeunes partaient la fleur au fusil, promettant à qui voulait bien les entendre un retour rapide une fois les Allemands battus et repoussés chez eux.
Sur le front et dans l’Hexagone, les mentalités sont différentes.
Surnommés poilus parce qu’ils ne se rasaient plus, les soldats engagés pendant la première guerre mondiale vécurent un enfer que nul ne peut imaginer. Pendant cette période nombreux furent les civils, et certains militaires aussi, à se gausser de ces « sauvages » faisant la guerre et qu’ils ne percevaient qu’au travers de quelques journaux « partisans ». Cette ignorance se transformait en angoisse quotidienne dans les campagnes, chez les pauvres gens, sachant leurs enfants partis, peut-être pour toujours.
Pour tous ces braves, peu instruits pour la plupart et prêts à sacrifier leur vie, la guerre fut une hécatombe aussi bien d’un côté que de l’autre : à Verdun la bataille de 1916 tua 163.000 Français et 143.000 Allemands ; les pertes humaines au total sont dramatiques : 8 millions de morts au total dont 1.350.000 tués ou disparus Français, soit 10% de la population active masculine).